TRAITEMENT DU SIGNAL GPS


Avertissement : ceci est un petit traité mathématique sur la théorie du traitement des données GPS (d'après R.W. King et al., 1985). Il y est notament expliqué comment s'affranchir des erreurs ou imprécisions d'horloges pour obtenir un positionnement précis (différentiel). L'impact de l'Ionosphère est également expliqué, et l'utilité du GPS bi-fréquence pour s'en affranchir est exposée et détaillée. Des graphiques montrant des données typiques sont commentés.

Autres sources :



1/ Phase "one-way"


La donnée que l'on récupère à la sortie d'un récepteur GPS est la différence entre la phase de l'onde émise par un satellite et la phase d'un oscillateur interne au récepteur. La phase de l'onde reçue est affectée par l'effet Doppler du au déplacement du satellite, la réfraction atmosphérique, et le bruit de mesure du récepteur. On peut écrire la différence de phase ij(tj), au temps t, à la station j, et pour le satellite i, comme suit :

ij(tj) = ijr - jl + nij + bruit





Par ailleurs, le signal reçu au temps tj est lié au signal émis au temps ti par le ième satellite par la relation suivante:

tj = ti + ij(tj)

dans laquelle ij est le temps de propagation qui dépend de la géometrie satellite-station, et des perturbations ionospheriques et tropospheriques.


On en déduit que la phase du signal reçu au sol est relié à la phase transmise par le satellite par:

ijr(tj) = it(tj - ij)



Il nous faut maintenant "modéliser" la phase de l'oscillateur du satellite. C'est à dire "savoir" ce qu'elle vaut en fonction de la fréquence de cet oscillateur.


Modélisation de l'oscillateur du satellite : (it)

Bien sur, un oscillateur n'est jamais stable dans le temps !

On devrait avoir :

it(t+t) = it(t) + it(t)t


Par cette équation, on écrit simplement que l'évolution de la phase avec le temps est linéaire. La phase augmente avec le temps : à un instant t+t elle vaut ce qu'elle valait à l'instant t, plus la quantité dont elle a augmenté pendant le temps t.
est le taux d'accroissement de la phase (ou encore la dérivé de la phase) par rapport au temps.



Et en fait, on a une expression plus complexe avec des termes supplémentaires :

it(t+t) = it(t) + it(t)t +  it(t)t2 + ...

dans laquelle et représentent respectivement le taux de changement de la phase (la fréquence), et l'accélération de ce taux (la dérive de la fréquence). On néglige les termes suivants (l'accélération de la dérive par exemple).


On a donc, pour la phase "One-way" :

ij(tj) = it(tj) - it(tj)ij(tj) +  it(tj)ij2(tj) - jl(tj) + nij + bruit




On modélise la fréquence de l'émetteur i, comme suit :

fi(t) = f0 + ai + bi(t-t0)


t0 est une "époque" de référence située quelque part pendant la transmission. La fréquence nominale f0 est la même pour tous les satellites, le décalage initial ai "offset" et la dérive bi "drift" sont propres à chaque oscillateur.


Il faut intégrer la fréquence pour obtenir la phase, on a donc :

tj

it(tj)

=

it(t0)

+

[ f0 + ai + bi(t-t0) ] dt

t0

=

it(t0)

+

(f0 + ai)(tj-t0) + bi(tj-t0)2


et donc :

it(tj) = [d / dt ]tj = fi(tj) = f0 + ai + bi(tj-t0)



it(tj) = [d2 / dt2 ]tj = [ dfi / dt ]tj = bi




Modélisation de l'oscillateur du récepteur : (il)

On peut modéliser l'oscillateur de la station j exactement de la même manière que l'oscillateur du satellite i, et on obtient :

tj

jl(tj)

=

jl(t0)

+

f1qj

+

f1

[ 1 + rj + sj(t-t0) ] dt

t0

=

jl(t0) + f1qj + f1(tj-t0) + f1rj(tj-t0) + f1sj(tj-t0)2


où rj et sj representent l'offset et la dérive en fréquence de l'horloge du récepteur j par rapport à une fréquence nominale f1.




On obtient donc finalement pour la phase "One-Way" :

ij(tj)

=

- (f0 + ai + bi(tj-t0)) ij(tj) + biij2(tj)

+ it(t0) + f0(tj-t0) + ai(tj-t0) + bi(tj-t0)2

- jl(t0) - fjl(tj-t0) - fjlqj - fjlrj(tj-t0) - fjlsj(tj-t0)2

+ nij + bruit


Seuls les termes de la 1ière ligne dépendent du temps de parcours ij et donc de la distance satellite-station.

Le premier terme est simplement le produit de la fréquence modélisée de l'émetteur par le temps de propagation. le deuxième terme quadratique est faible et peut être négligé.

Les effets de l'instabilité des horloges des satellites et des récepteurs apparaissent dans les lignes 2, 3, et 4.
La combinaison des premiers termes des lignes 2 et 3 représente la différence de phase entre les deux oscillateurs aux temps t0. Cette différence de phase est différente de "l'ambiguïté entière" nij qui représente le nombre inconnu d'oscillations entières entre le satellite et la station.

Les seconds termes des lignes 2 et 3 peuvent disparaitre si la fréquence nominale de l'oscillateur de la station est exactement égale à la fréquence nominale f0.

Les termes restants représentent les erreurs de mesure dues aux fluctuations des horloges des satellites et des récepteurs, plus un certain bruit inhérent aux mesures de phase (bruit)




2/ Simples différences

En combinant les données obtenues à deux stations différentes pour le même satellite j, on peut éliminer le principal des erreurs provenant de la dérive de l'horloge du satellite considéré. En effet, en prenant f0 = fj1 = fj2, on obtient :

i

=

i2 - i1

=

- f0(i2-i1)

- (ai + bi(t-t0))(i2-i1)

- f0(r2-r1)(t-t0) - f0(s2-s1)(t-t)2

- [12(t0) - 11(t0)] - f0(q2-q1) + (ni2-ni1)

+ bruit

La première ligne représente l'effet géométrique.

La deuxième ligne contient la dérive de l'horloge du satellite qui est faible (les termes quadratiques en (t-t0)2 ont été éliminés par la différenciation.

La troisième ligne contient les effets des horloges des deux récepteurs qui sont les erreurs les plus importantes.

La quatrième ligne contient les différences de phase initiale entre les deux oscillateurs des récepteurs au temps t0 (incluant un terme représentant l'offset des horloges), ainsi que la différence des ambiguïtés.





3/ Doubles différences

On peut faire les mêmes différences entre satellites pour une station donnée, qui vont donner une observable affranchies des erreurs provenant des horloges des stations. Mieux encore, on peut différentier entre satellites l'observable différentiée entre stations, et s'affranchir des erreurs provenant des horloges des satellites et des stations. C'est le principe de la double-différence. On obtient alors :

2i

=

2 - 1

=

- f0(22 - 21 - 12 + 11)

- (a2 + b2(t-t0))(22-21)

+ (a1+b1)(t-t0))(12-11)

+ (n22 - n21 - n12 - n11) + bruit

l'effet géométrique représenté par le produit de la fréquence nominale et des temps de propagation apparait en ligne 1. Les lignes 2 et 3 contiennent des quantités dépendant de la dérive des horloges des satellites (faible à priori) multipliées par les différences des temps de parcours (quantité faible devant le temps de parcours lui même). Ces quantités seront d'autant plus faibles que les distances entre stations seront faibles. La quatrième ligne contient les ambiguïtés entières (le nombre entier inconnu d'oscillations entre satellite et récepteur. les différences de phases initiales entre satellites et recepteurs ont été éliminées.



4/ Influence de l'Ionosphère : Le GPS bi-fréquence

L'Ionosphère est un "nuage" de particules chargées (ions et électrons) qui enveloppe la Terre entre 70 et 2000 km d'altitude. Les ondes émises par les satellites GPS orbitant à 20000 km d'altitude doivent donc traverser cette couche avant d'arrivée sur la Terre. Le signal GPS est perturbé comme toute onde électromagnétique traversant un milieu conducteur. Cette perturbation se manifeste par un retard, c'est à dire que la vitesses de propagation de l'onde dans ce milieu conducteur qu'est l'Ionosphère est plus faible que ce qu'elle serait dans le vide. Le temps de propagation de l'onde est donc plus long que ce qu'il serait dans le vide, ce qui conduit à surestimer la longueur de la distance satellite-station.

si l'onde GPS se propageait dans le vide, la phase vaudrait :

= (f.r) / c

f est la fréquence de l'onde, r la distance à parcourir, et c la vitesses de propagation (la vitesse de la lumière dans le vide).

Du fait de la propagation dans un milieu conducteur (l'Ionosphère) il faut considerer une perturbation. Au premier ordre, l'Ionosphère peut etre considérée comme un milieu dispersif, c'est à dire que le retard induit est inversement proportionnel au carré de la fréquence de l'onde. Sur la phase, cela se traduit par un décalage qui est inversement proportionnel à la fréquence de l'onde. On peut donc écrire la phase :

= (f.r) / c - / f

est un nombre qui dépend de la conductivité de l'ionosphère, c'est à dire de la densité d'électrons et d'ions dans ce milieu.


Le problème vient du fait que ce nombre est en général inconnu et très variable dans le temps. En effet, l'ionosphère est sujette à des courants électro-magnétiques violents, à des tempetes de particules chargées, tout cela en relation avec les flux de particules qui nous viennent du soleil: les "vents" solaires. Il est donc à priori impossible de connaitre le décalage de phase induit par l'ionosphère sur une fréquence donnée. Heureusement, le décalage dépendant de la fréquence, il est possible de contourner le problème en émettant sur deuxfréquences différentes. La comparaison de l'effet sur chacune des fréquences permet alors de le quantifier, et donc de l'éliminer.
On écrit donc

pour l'onde 1 : 1 = (f1.r) / c - / f1


pour l'onde 2 : 2 = (f2.r) / c - / f2


On peut éliminer l'effet de l'Ionosphère (le facteur ), en faisant une combinaison linéaire (C) de 1 et 2 :

C = f12 /(f12-f22) ( 1 - f2 / f1 2 )


En substituant 1 et 2 par leur expression en fonction de f1 et f2, on obtient aisément :

C = f12 / (f12-f22) . (f12-f22) / f1 . (r/c) = f1 . r/c

Cette expression montre clairement qu'en utilisant cette combinaison des deux phases mesurées (1 et 2), on élimine l'effet de l'Ionosphère (au premier ordre au moins), et qu'on a bien une "phase virtuelle" C qui se comporte comme si l'onde 1 se propageait dans le vide.



5/ Influence du centre de phase des antennes

Le point physique où se matérialise l'onde GPS qui arrive sur l'antenne réceptrice est appelé le centre de phase de l'antenne. Le problème est que ce point est immatériel, que sa localisation au millimètre près est très difficile, et qu'en plus sa position a tendance à dépendre de l'angle incidence et de l'azimut du signal. Il apparait donc que l'on ne mesure pas la position d'un point fixe : le centre géométrique de l'antenne, mais la position d'un point mobile dans un espace qui peut aller jusquà 10mm de rayon. Il n'y a pas d'autre solution que de calibrer parfaitement chaque antenne, afin d'établir une cartographie précise de la position du centre de phase en fonction de l'azimut et de l'élévation du signal incident. Cette "fonction d'appareil" devra etre appliquée à chaque mesure de phase.
En pratique, de telles calibration sont extrèmement difficiles à réaliser. On procède donc de manière relativement empirique : en n'utilisant que des antennes identiques, toutes alignées dans la meme direction. si la position de chaque antenne varie dans le temps, la distance entre les antennes reste bien invariable, le centre de phase de toutes les antennes se déplaçant en meme temps de la meme quantité dans le meme direction.




6/ "Dégradation volontaire du signal"

Il ne faut pas oublier que le GPS est un système conçu par et pour les militaires américains. En conséquence, un certain nombre de moyens ont été mis en place pour empecher l'utilisation du système par un hostile. Ce but est atteint par la dégradation volontaire de la précision du positionnement pour tout utilisateur non autorisé.

La "Selective Availability" (SA)

La "selective availability" fonctionne de manière permanente sur la quasi totalité des satellites.

L' "Anti Spoofing" (AS)
l'Anti spoofing est lui aussi activé en permanence sur la plupart des satellites. Les récepteurs géodésiques modernes sont tous équipés de l'option "code-Z" ou "cross-corrélation".




7/ Inversion et calcul des déplacements

a -- équation des observations au temps t

Ct = Lt + Vt

On peut linéariser cette équation, et l'on obtient :

Ca + A dx = L + V


b -- minimisation par moindres carrés

La solution est donnée par :

= xa + dx

dans laquelle :

dx = (AT . W . A)-1 . AT . W (L - Ca)


c --modélisation de la déformation

On considère la station m à l'instant t0
Sa position est donnée par le vecteur : xt0m
Sa "distance" dans le temps et dans l'espace
par rapport à une origine arbitraire est donnée par
: xt0m = xt0m - xt00
A ti, on a : xtim = xt0m + (ti - t0) um

expression dans laquelle um est le vecteur vitesse de la station m (constant au cours du temps).


Pour relier les vitesses de déplacement aux déformations, on va utiliser la notation tensorielle suivante : Lij = duim / dxj

. .
relation dans laquelle : L = E + W


partie symétrique
taux de déformation
partie antisymétrique
taux de rotation

Dans le détail, les deux tenseurs s'écrivent :
. . E11 E12.
E = (L + LT) =
E21 E22


. . 0 W.
W = (L - LT) =
-W 0



Le tenseur des taux de déformation admet pour valeur propres 1, 2, et . 1 et 2 sont les taux d'extension et de compression suivant les directions principales définies par l'angle entre la direction 2 et le Nord.

On a les relations suivantes :

1 = E11 cos2 + E22 sin2 - 2 E12 sin cos
2 = E11 sin2 + E22 cos2 - 2 E12 sin cos



On introduit les mesures de la position de la station m à une certaine époque : m.
Comme précédemment pour les xm, on a : m = m - 0

Les vitesses .

E m

     s'écrivent .

Cme

      avec :

W m

Dmw



e =

.

E11

.

et w = W12

E22

E12


INCONNUES

L'ajustement sur la position de la station m au temps ti est donc :

xtim

=

xt0m + xt00

+

(ti-t0)(u0 + Cme + Dmw)



ajustement des positions initiales
de l'origine et de la station m
déplacement de la station m au cours du temps


Cet ajustement représente la différence entre les coordonnées mesurées x et les coordonnées modélisées . C'est en minimisant cet ajustement que l'on obtiendra les taux de déformation et de rotation qui "expliquent au mieux" les données. Pour cela, on dispose d'un jeux de M équations (autant que de stations) à un temps donné. Puis autant de jeux que d'époques de mesures.





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